Alerte accident du travail : encore un mort chez Cristal Union

Article paru sur le Blog Médiapart d’Éric LOUIS, le 24/10/2022

 

Ce mercredi 19 octobre 2022, une nouvelle fois, un ouvrier a été victime d’un très grave accident du travail dans la sucrerie d’Erstein, dans le Bas Rhin. Une fois de plus, Cristal Union, fabricant de la marque Daddy Sucre a failli à son devoir de préservation de la santé et de la sécurité d’un de ses travailleurs.

On en sait peu sur les circonstances du drame. Comme d’habitude lorsqu’il s’agit d’un accident du travail. La vie des ouvriers dans ce pays ne vaut pas grand-chose.

Quand l’accident survient pour l’un d’entre eux, il a droit à quelques lignes dans la presse régionale. Encore les informations y sont-elles floues.

On ne connait pas le nom du gars. Son âge ? 45 ans pour certains médias, 51 selon France 3 Grand Est. Tous reprennent les quelques lignes disponibles : Un employé de la sucrerie Cristal Union d’Erstein (Bas-Rhin) a été grièvement blessé dans un accident du travail, mercredi 19 octobre 2022 en début d’après-midi. Selon France Bleu Alsace , le mécanicien se serait retrouvé coincé sous un tapis roulant qui apporte des pierres au four à chaux. Ce sont des collègues qui l’ont découvert, inanimé. La victime a d’abord été prise en charge par l’équipe de secours de l’entreprise. Les pompiers ont pris le relais et sont parvenus à la réanimer, explique le média local. L’employé a ensuite été héliporté vers un hôpital à Strasbourg.

Et ça se termine sur l’inévitable enquête de la gendarmerie et de l’inspection du travail.

L’ouvrier serait « dans un état sérieux, mais stable. Il a été placé sous coma artificiel« , aux dires d’une une porte-parole du groupe Cristal Union.

Il ne faut pas compter sur plus de loquacité de la part des communicants de cette boite. Ce sont des spécialistes de l’accident du travail, et de l’omerta qui convient de faire régner autour.

Ce dimanche, la triste nouvelle est tombée, l’ouvrier est décédé des suites de ses blessures.

Depuis un certain nombre d’années, Cristal Union peut se targuer d’un terrible palmarès.

Jusqu’à ce jour, 6 travailleurs ont trouvé la mort dans les usines de Cristal Union. Un septième vient d’allonger la liste.

2010 : Jordan Balloir, chute d’un silo de 54 mètres.
2012 : Vincent Dequin, enseveli au fond d’un silo de sucre.
2012 : Arthur Bertelli, enseveli au fond d’un silo de sucre.
2017 : Quentin Zaraoui-Bruat, enseveli au fond d’un silo de drêches.
2018 : Pascal Cuchot, écrasé par une benne métallique.
2019 : Eric Laurin, chute d’une passerelle de 10 mètres.

Au-delà, des accidents très graves viennent compléter ce macabre inventaire.

En 2015, Jérémy Devaux avait été grièvement brûlé sur une grande partie du corps.
En 2021, Thierry et Frédéric ont eux aussi été grièvement brûlés par un jet de vapeur sous pression.

Un mois avant, un ouvrier avait déjà subi le même type d’accident dans l’usine de Bazancourt.

Et encore, de nombreux accidents restent sous l’éteignoir, le groupe n’ayant aucun intérêt à rendre publique une situation catastrophique en termes de sécurité au travail.

Dans le même temps, le groupe sucrier se targue d’une nouvelle communication.

« Il y a de l’humain dans ce grain ». L’apogée du cynisme ! Le point de bascule de la connerie entrepreneuriale !

Il y a effectivement un paquet d’humains dans les produits Cristal Union. Des humains qui y ont laissé leur santé, leur intégrité physique. Leur vie.

L’ironie du hasard a voulu que je reçoive cette image samedi, une heure avant de recevoir un mail qui m’apprenait l’atroce accident.

En 2017, à la suite de la mort de Quentin, l’association cordistes en colère cordistes solidaires avait mené une campagne de boycott des produit Daddy.

Il y a quelques mois, je recevais, par un travailleur bien intentionné, une vidéo d’accueil destinés aux intervenants extérieurs sur les sites du groupe. Là aussi l’ironie transpire.

En introduction de la vidéo, Xavier Astolfi n’a pas l’air de croire lui-même à ce qu’il dit. Il est préoccupé de lire son prompteur et de faire bonne figure. Pas sûr que la sécurité des travailleurs soit son sacerdoce.

Olivier de Bohan, son PDG ne clame-t-il pas :  « Qu’est que vous voulez que je vous dise ? Dans la vie des entreprises, il y a ce type d’accident. » Fatalitas !

Voici les paroles que ne prononceront pas les dirigeants encravatés de Cristal Union :

Sincères condoléances à la famille de cet ouvrier, à ses collègues, à ses proches. Que tous ensemble, passée l’épreuve terrible du deuil, ils trouvent la force et la ressource de se retourner contre cet employeur assassin depuis trop longtemps.

 

 

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