Quentin Zaraoui-Bruat est décédé le 21 juin 2017, à Bazancourt, enseveli dans un silo de drêches. Il travaillait comme cordiste au sein d’une des usines du géant du sucre CRISTAL UNION.
Le 26 novembre 2020, le Pôle Social de Saint Brieuc (ancien TASS, Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale), a rendu son jugement visant à déterminer la faute inexcusable de la chaîne d’employeurs dans les circonstances de l’accident de travail ayant coûté la vie à Quentin : agence d’intérim (Cordial / PROMAN), entreprise utilisatrice (ETH) et donneur d’ordre (CRISTAL UNION).
Avant de communiquer sur ce jugement, nous attendions que le délai au cours duquel les employeurs auraient pu faire appel soit écoulé. C’est chose faite. Aucun appel n’a été déposé. La décision de justice est aujourd’hui définitive.
En voici les points essentiels :Le tribunal déclare que « ETH, l’entreprise utilisatrice, a commis une faute inexcusable dans la réalisation de l’accident de travail du 21 juin 2017 dont Quentin Zaraoui est décédé. »
De plus, le tribunal coupe court à tout débat sur une supposée responsabilité de Quentin dans la survenue de son propre accident :
« Les éléments de l’enquête et spécialement le procès-verbal d’inspection du travail ne caractérisent pas un comportement de mise en danger de soi-même de la part de Monsieur Zaraoui d’une telle gravité qu’il présenterait le caractère d’une faute inexcusable. »
« Spécialement les traces de cannabis dans les analyses de sang de Monsieur Zaraoui ne permettent pas de démontrer en soi que cette consommation de toxique, non datée, ait eu un quelconque rôle causal dans l’accident dont il a été victime. »
Ainsi, non seulement la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, mais il est surtout entériné que Quentin, dans le contexte dégradé dans lequel il travaillait ce jour-là, n’a pas commis de faute ayant pu entraîner son accident.
Au-delà, contrairement à ce qu’affirmait de manière éhontément mensongère la substitut du procureur de Reims à l’audience pénale de 2019, le tribunal exclut toute corrélation entre une consommation de cannabis et l’accident.
À ces titres, la CPAM des Côtes d’Armor est condamnée à verser à la succession de Quentin la somme de 30 000 euros.
L’employeur légal de Quentin, l’agence d’intérim CORDIAL (PROMAN), est condamnée à rembourser cette somme à la CPAM.
L’entreprise utilisatrice, ETH, est condamnée à garantir PROMAN des conséquences financières de la faute inexcusable.
Enfin, ce jugement est déclaré « opposable » à la société CRISTAL UNION.
Cette dernière décision signifie qu’ETH, condamnée pour sa faute inexcusable, peut agir directement à l’encontre d’un tiers responsable de l’accident, en l’occurrence CRISTAL UNION, pour « récupérer » les sommes versées à la victime via la Caisse primaire d’assurance maladie.
Au travers de cette déclaration, c’est une part de responsabilité de la société CRISTAL UNION qui est reconnue dans le cadre de cet accident.
Toutefois, le tribunal ne peut statuer sur les demandes concernant les manquements et les fautes de CRISTAL UNION en tant que donneur d’ordre, celles-ci ne relevant pas du contentieux de la Sécurité Sociale ni de l’appréciation du Pôle Social.
C’est donc en vue de cet éventuel futur litige, devant une autre juridiction, entre les sociétés ETH et CRISTAL UNION que le Tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a déclaré le jugement opposable à CRISTAL UNION.
Reste à savoir si la PME ETH osera affronter le géant milliardaire CRISTAL UNION, comme nous le faisons depuis plus de 3 ans.
Et comme nous allons continuer à le faire…