DÉLIBÉRÉ – Décès d’Arthur et Vincent : Cristal Union et Carrard condamnés en appel

Le 21 septembre 2021, s’était tenu à Reims le procès en appel de l’accident du travail qui avait coûté la vie en mars 2012 à Arthur Bertelli et Vincent Dequin. Tous deux ensevelis sous des tonnes de sucre dans un silo de l’usine Cristal Union à Bazancourt.
Cet après-midi (mercredi 24 novembre), le délibéré a été rendu.

Peines en partie confirmées :
Cristal Union et Carrard Services sont de nouveau reconnues coupables d’homicide involontaire et chacune condamnées à 100 000€ d’amende.
Les peines sont confirmés pour Michel Mangion, le chef d’établissement de Cristal Union, avec 6 mois de prison avec sursis et 15 000€ d’amende.

Une partie des peines amoindries :
Contrairement au jugement de première instance,
David Duval, chef d’établissement de Carrard est relaxé.
La mise sous surveillance judiciaire des deux sociétés pendant 2 ans, et l’obligation de d’affichage et de publication des peines prononcées par le tribunal correctionnel en mars 2019 sont abandonnées.

L’abandon de la mise sous surveillance judiciaire des entreprises est donc la grande déception de ce rendu. Il s’agissait de la peine qui aurait eu le plus de sens pour assurer la protection de la santé et de la sécurité des ouvriers travaillant sur les sites de ces sociétés. D’autant plus au regard des nombreux accidents graves et mortels qui continuent de se produire au sein des usines Cristal Union .

Reste donc, presque uniquement les amendes pénales de 100 000€ .
Que signifie une telle somme pour des groupes comme Cristal Union et Atalian (à qui appartient Carrard Services) qui pèsent chacun plusieurs milliards d’euros de chiffre d’affaire annuel ?

Les condamnés ont 5 jours pour se pourvoir en cassation…


REVUE DE PRESSE

Accident du travail : Cristal Union et Carrard Services condamnés
Le Monde, 01/12/2021

Cordistes décédés dans un silo :
Cristal Union et Carrard Services condamnées

L’Union, 24/11/2021

Reims : Cristal Union et Carrard services condamnés à 100 000€ d’amende suite à la mort de deux cordistes dans un silo en 2012
France 3 Champagne, 24/11/2021

 » La vie ne tient qu’à un fil quand on est accroché à une corde »
Radio Parleur, Twiter, 24/11/2021

La colère est dans la rue / Contre matinale #41
Le Média,  24/11/2021

PRESSE : Le dernier chantier de Régis, cordiste, mort sur le coup

DOCUMENTAIRE VIDÉO

« Régis, mort au travail : la situation dramatique des cordistes« ,
le documentaire de France Timmermans et Franck Dépretz,
19 min., Blast, le 17/11/2021


ARTICLE / ENQUÊTE

Le dernier chantier de Régis, cordiste, mort sur le coup
Par Franck Dépretz, journaliste indépendant,
publié le 17/11/2021 sur BLAST

Régis Brugière de Barante était un cordiste chevronné, mais la mission qui lui a coûté la vie le 27 août 2018 n’avait rien à voir avec les travaux sur cordes. « Pionnière » dans ce domaine, son entreprise l’avait envoyé fragmenter des roches avec des cartouches pyrotechniques sans qu’il n’ait reçu la formation obligatoire pour les manipuler. Pas suffisamment à distance de l’explosion, un éclat de roche fatal l’a frappé à la tête. Ce jeune papa de 38 ans a rejoint la longue liste – pour une si petite profession – des 26 cordistes morts au travail, recensés depuis 2006 par l’association Cordistes en colère, cordistes solidaires. Troisième volet de notre enquête sur les cordistes, une profession hautement mortelle.

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VIDÉO – Émission ARRÊT SUR IMAGES

« Un gamin qui meurt au fond d’un silo, personne n’en parle »

L’invisibilité des accidents du travail dans les médias
Arrêt sur Images, 27 octobre 2021

Un livreur Uber circulant à scooter meurt percuté par un conducteur qui a pris la fuite, lundi 25 octobre à Lille, rapporte « La Voix du Nord ». La même journée, c’est un intérimaire de 18 ans qui décède dans un abattoir à Lanfains, dans les Côtes-d’Armor : il s’est retrouvé coincé sous une cuve contenant des centaines de kilos de poulets, selon « Ouest France ». Samedi 23 octobre, un ouvrier de 28 ans meurt sur le chantier d’un immeuble en construction à Pleurtuit, en Ille-et-Vilaine : la dalle en béton d’un balcon s’est effondrée sur lui, selon France Bleu Armorique. En l’espace de trois jours seulement, ces travailleurs sont morts dans l’exercice de leur activité professionnelle. Mais il y a de grandes chances que vous n’en ayez pas entendu parler. Les accidents du travail sont ignorés dans les médias, ou alors abordés en quelques lignes, souvent dans la seule presse locale. Pourquoi une telle invisibilité ? Pour y répondre, trois invités : Philippe Poutou, porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), ancien ouvrier chez Ford à Blanquefort, candidat NPA à l’élection présidentielle de 2022 ; Véronique Daubas-Letourneux, sociologue du travail, enseignante à l’École des Hautes études en santé publique et spécialiste des questions de santé au travail ; et Éric Louis, ancien cordiste, cofondateur de l’association Cordistes en colère, cordistes solidaires, fondée à la suite de la mort d’un de ses collègues, Quentin Zaraoui-Bruat, en juin 2017, enseveli dans un silo de céréales. […]

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Source : Arrêt sur Images


À lire aussi : «Le sujet des accidents du travail est invisibilisé», Interview de Véronique Daubas-Letourneux autrice du livre « Accidents du travail, des morts et des blessés invisibles », Médiapart, le 27/10/2021

 

PRESSE – Interview de l’autrice du livre « Accidents du travail, des morts et des blessés invisibles »

Article paru sur Médiapart le 27 octobre 2021

La sociologue Véronique Daubas-Letourneux : «Le sujet des accidents du travail est invisibilisé»

Alors que quatorze décès surviennent chaque semaine rien que dans le privé, la chercheuse Véronique Daubas-Letourneux interroge l’absence de données complètes sur les accidents du travail en France.

Le lundi 25 octobre, un intérimaire est mort dans un abattoir de Lanfains, dans les Côtes d’Armor, écrasé sous 500 kilos de volaille. Il avait 18 ans. Trois semaines plus tôt, c’est Harouna Samaté, un apprenti de 17 ans, tout juste engagé dans un CAP plomberie, qui a perdu la vie après une chute sur un chantier de BTP où il travaillait, à Villefranche-de-Lonchat (Dordogne).

Un observateur distrait qui se fierait à l’écho médiatique – presque inexistant – de tels drames conclurait facilement que mourir au travail est très rare en France. Il se tromperait lourdement.

Chaque semaine, dans le seul secteur privé, qui couvre environ 85 % de la population, on dénombre en moyenne pas moins de quatorze accidents du travail mortels. Et plus de 12 500 accidents nécessitant au moins un jour d’arrêt. Tous les huit jours, plus de 650 personnes subissent des blessures dont ils garderont des séquelles.

Ces accidents sont passés presque totalement sous silence, mis à part des initiatives personnelles, comme le décompte effectué par le professeur d’histoire-géographie Matthieu Lépine, et de rares articles de presse (par exemple sur Mediapart, ici ou ).

La sociologue Véronique Daubas-Letourneux, enseignante-chercheuse à l’École des hautes études en santé publique, questionne les ressorts de cette invisibilité dans un livre passionnant pubié en septembre dernier, Accidents du travail – Des morts et des blessés invisibles (Bayard).

Tout son mérite est d’aller au-delà des chiffres et de scruter ce que révèlent ces événements : inégalités, rapports d’exploitation, travail qui s’intensifie en continu… « Les accidents du travail sont dus au travail », résume la chercheuse dans une formule limpide.

Mediapart : Comment expliquer que les accidents du travail restent largement invisibles, dans le débat public mais aussi dans les statistiques ? LIRE LA SUITE